Discours d’ouverture des Etats-généraux, 5 mai 1789

Tombant, à la lecture des Reflections on the Revolution in France d’Edmund Burke, sur une citation que cet auteur faisait du rapport de M. le Directeur général des finances, Necker, lors de la séance solennelle d’ouverture des États-généraux à Versailles le 5 mai 1789 (« Quel pays, Messieurs, que celui où sans impôts et avec de simples objets inaperçus on peut faire disparoître un déficit qui a fait tant de bruit en Europe !»), j’ai voulu resituer cette citation dans le contexte général du rapport. Mais, de façon curieuse pour un texte d’une telle importance historique, ce rapport n’était pas disponible sur le web dans une version facilitant sa lecture. Tout ce que j’ai pu trouver, ce sont des versions numérisées par Google, mais sans les retouches manuelles généralement nécessaire, même pour des textes plus récents, après passage par un logiciel de reconnaissance optique des caractères.

J’ai donc récupéré la version numérisée par Google de cette édition datant de 1789, imprimée à Strasbourg par la librairie ordinaire du Roi. Je l’ai corrigée des erreurs de lecture dues à l’OCR et mise en forme à l’aide de XeTeX pour produire une version PDF navigable et modernisée. Je n’ai pas cherché à reproduire la typographie ancienne (dont les belles accolades du premier tableau en annexe). Cela serait sans doute possible avec une version ou une autre des logiciels dérivés de TeX, mais cela n’entre pas dans mes compétences immédiates (il faudrait y consacrer un peu de temps).

Sur le fond, l’exposé de Necker prend une saveur particulière quand on le compare à la situation actuelle, celle d’un gouvernement à la recherche de 50 milliards d’euros d’économies. Les revenus fixes de l’Etat, au 1er mai 1789, étaient évalués à 475 294 000 livres pour des dépenses fixes évaluées à 531 444 000 livres. Les revenus ne couvraient donc que 89 % des dépenses et le déficit était de 56,15 millions de livres (on n’avait pas encore inventé cet indicateur étrange qu’est le déficit rapporté au PIB). La première mission des députés réunis à Versailles était donc de rétablir l’équilibre et cela de façon pérenne.

Lorsque vous aurez examiné, Messieurs, la situation des finances dans son ensemble et dans ses divisions principales, et ensuite, si vous le voulez, dans ses plus petits détails, vous vous hâterez sûrement de concourir aux moyens qui peuvent introduire un parfait équilibre entre les revenus et les dépenses fixes ; car ainsi que nous l’avons déjà montré, plus cet équilibre sera retardé et plus le mal fera des progrès ; car le déficit exige des emprunts, leurs intérêts augmentent le déficit, et le prix de ces intérêts s’accroît avec la multiplication des emprunts.

On lira dans le rapport les pistes que proposait Necker. Mais la question des finances n’était pas la seule que les députés des trois Ordres étaient invités à examiner. On lira avec intérêt les propositions de Necker en faveur de ce que l’on n’appelait pas encore décentralisation ou subsidiarité, dans le cadre d’Etats-provinciaux qu’il imaginait de généraliser :

Ces Etats bien constitués s’acquitteront de toute la partie du bien public, qui ne doit pas être soumise à des principes uniformes ; et il seroit superflu, Messieurs, de fixer votre attention sur la grande diversité de choses bonnes et utiles qui peuvent être faites dans chaque province, par le seul concours du zèle et des lumières de leur administration particulière.

Ce ne fut pas, on le sait, le choix des révolutionnaires qui préférèrent accroître encore la centralisation administrative…

Le texte téléchargeable ci-dessous comprend le bref discours du Roi, celui du Garde des Sceaux, Charles Louis François de Paule de Barentin, et celui, le plus long, du directeur général des finances, Jacques Necker.

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