Les vingt ans de la petite Vera (Маленькой Вере – 20 лет)

En 1988, il y a eu vingt déjà (en avril), sortait en URSS le film de Vassili Pitchoul, La petite Vera (Маленькая Вера). En mai 1986, le Ve congrès de l’Union des cinéastes d’URSS avait libéralisé le cinéma soviétique et des sujets jusque là interdits pouvaient désormais être traités. La petite Vera est sans doute l’un des films les plus emblématiques de cette perestroika alors en cours. Avec le recul, le film n’apparaît sans doute pas comme un chef d’œuvre, mais il avait le mérite de dessiner un portrait réaliste (et plutôt noir) de ce que vivait une partie de la jeunesse soviétique ainsi que des conflits de générations. Le succès populaire de ce film (55 millions d’entrées dans les salles de cinéma soviétiques) témoigne en tous cas de l’intérêt que lui porta le public (et sans doute pas seulement parce que l’on y voyait pour la première fois une scène de sexe).

L’extrait suivant est le tout début du film. Vera habite avec ses parents dans un petit appartement d’une ville industrielle de province. Sa mère a trouvé 20 dollars dans son sac ce qui déclenche une nouvelle dispute familiale (en URSS, la détention de devises étrangères était illégale et pouvait conduire en prison). S’ensuit le dialogue suivant (au bout d’environ 3′ 30):

– Le père : où as tu pris l’argent ?
– Vera : je l’ai trouvé…
– La mère : et que tu ailles à la police et que tu leur racontes tout !

Puis la mère téléphone au frère, Victor, qui lui a « réussi » dans l’armée à Moscou :

– La mère : Vitia, c’est maman qui appelle. Je te téléphone au sujet de Vera. J’ai fouillé dans son sac aujourd’hui, pour trouver un stylo. Et tout à coup, je tombe sur un drôle de papier. Je le retourne. Et c’était un billet de 20 dollars étrangers. Oui, 20 dollars.
– …
– La mère : Comment ça « où » ? Elle dit qu’elle les a trouvés. Elle marchait dans la rue et elle les a trouvés. …

Le dialogue est savoureux quand on sait le rôle joué par le dollar dans l’économie russe des années qui ont suivi…

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